Les sources d'un savoir
Sait-on vraiment ce que pouvaient manger nos ancêtres médiévaux ? Quelles sont les sources, quelles sont les traces, quels sont les vestiges, quels sont les témoins de l'alimentation au
Moyen-Âge ? Les documents disponibles sont, comme toujours, de trois ordres : textuel, iconographique et archéologique. Si le
Moyen-Âge n'a pas inventé le livre de recettes (que l'on songe au traité d'Apicius écrit à la fin du IV
ième siècle de notre ère) il en livre tout de même une bonne centaine aux historiens de la gastronomie. Ce ne sont pas toujours des livres de cuisine, au sens actuel du terme. Certains sont même écrits sur des rouleaux. Les précisions techniques sur les temps de cuisson ou sur la mesure des quantités d'ingrédients y sont souvent absentes ou réduites à des ellipses littéraires ; l'énumération de ces ingrédients, parfois incomplète, suggère que la rédaction de l'ouvrage tient plus de la description d'un talent que de la volonté de transmettre un savoir-faire à d'autres cuisiniers. Parmi ces livres de recettes, il en est un particulièrement célèbre : le Viandier , attribué à Guillaume Tirel, dit Taillevent, maître queux des rois Charles V et Charles VI. L'exemple de Guillaume Tirel, cuisinier à la cour des rois de France vers la fin du XIVème siècle, prototype de Vatel, sera suivi par une autre star de la cuisine médiévale : maître Chiquart, cuisinier près du dispendieux duc Amédée VIII de Savoie. Ces documents ne parlent presque pas d'alimentation populaire mais fixent un savoir culinaire d'origine essentiellement princière. Ce qui ne veut pas dire que l'on ne puisse y trouver des recettes d'une grande simplicité, mettant en œuvre des ingrédients parfaitement communs et, qu'à l'évidence, tout le monde était en droit d'apprécier. Les réceptaires culinaires qui suivront seront bientôt d'origine bourgeoise, comme le Ménagier de Paris, tout autant manuel domestique à l'usage des jeunes épouses inexpérimentées que livre de cuisine, copiant d'ailleurs ses nobles ancêtres. Les livres de comptes des grandes maisons seigneuriales ou des abbayes ainsi que d'autres textes notariés, comme ils listent de manière fort détaillée les richesses matérielles ainsi que les achats et les ventes, nous parlent à leur manière d'alimentation en énumérant les denrées et leurs coûts. Les manuscrits enluminés, les fresques, l'art lapidaire plus rarement, livrent aussi aux historiens une importante iconographie de l'alimentation. Peu d'images échappent au stéréotypes des scènes de banquets princiers ou bien à l'archétype chrétien de la Cène. Quelques manuscrits décrivent, souvent dans des scènes secondaires à l'illustration principale, l'alimentation quotidienne des paysans ou des ouvriers. Des manuscrits plus techniques décrivent eux la production végétale ou animale, la chasse, la pêche, l'élevage et ses occupations annexes ; montrant les étapes préalables à la consommation de produits transformés pour l'alimentation. La codification symbolique poussée de l' iconographie la plus abondante nous renseigne de plus sur les environnements culturels de la consommation des aliments, toujours plus que sur les plats servis. La représentation d'ustensiles de cuisine, d'accessoires de table, de vaisselle, de mobilier, la disposition des convives, la présence de personnel de service, tout ceci est précieux pour la compréhension générale de la gastronomie médiévale, qu'il ne faut pas réduire à la simple consommation de recettes. Les fouilles archéologiques livrent le dernier maillon de la chaîne nécessaire à notre intelligence de la gastronomie médiévale : les débris et les reliefs de cette activité. Depuis la coquille d'œuf à la salière en étain écrasée, depuis l'os de porc à l'arrête de poisson, depuis la vaisselle céramique cassée aux débris verriers ou de bois : tout ceci devient la preuve tangible de ce que les recettes des manuscrits décrivaient bien une réalité alimentaire. Ce sont également ces traces matérielles qui nous permettent de remettre en question bien des poncifs sur la gastronomie du
Moyen-Âge.
On mange ce qu'on est. Version culinaire du fameux : comme on fait son lit on se couche !
On ne le dira jamais assez : manger, c'est de la culture, au
Moyen-Âge, comme avant ou maintenant. L'alimentation est le reflet d'un statut social qui détermine la diversité des ressources alimentaires, leur abondance, la manière de les cuisiner et de les consommer, ainsi que le lieu et le temps de cette consommation. L'ouvrier agricole ariégeois ne mange pas comme le marchand montpelliérain et le seigneur toulousain comme le paludier au bord de la Méditerranée. Il ne faudrait pas pour autant en tirer des preuves pour parler d'inégalité devant l'alimentation, mais plutôt de disparité. Le quotidien de la nourriture est produit par le terroir même et dans une saisonnalité dont on n'imagine guère plus aujourd'hui les réalités. L'achat et l'échange nécessaires à l'approvisionnement en denrées moins habituelles supposent une économie, donc un système marchand élaboré. Toutes les régions n'en sont pas dotées. Au
Moyen-Âge romantique que l'on se représente volontiers fait de disettes paysannes, de ripailles monacales et de vaniteux gaspillages princiers, les historiens de la gastronomie auraient aujourd'hui tendance à substituer un
moyen-âge culinairement monotone et cyclique (mais tout de même abondant, du moins suffisant) pour les plus modestes et plus varié mais rarement festif pour les aisés. Il est exact que de grandes famines, comme celles de la crise céréalière des années 1315-1316, furent plus sensibles pour les paysans que pour les bourgeois des villes, mais l'économie de la subsistance, quelquefois économie de la survie, n'est pas notre sujet.
On mange mieux dans les villes
Il est intéressant également d'échapper à la classification des trois ordres féodaux qui auraient pu délimiter trois types d'alimentation pour signaler, à côté de l'évidence des différences entre les ressources culinaires de l'aristocratie et celles des classes pauvres, une opposition nouvelle entre le rural et le citadin. Ce nouveau bi pôle de la culture alimentaire apparaît au
Moyen-Âge. Il signifie qu'un quatrième groupe de la société, les urbains, dispose désormais des moyens d' échapper à une préparation exclusivement alimentaire de ressources peu variées . Ils accèdent ainsi à une alimentation de plaisir, basée sur l'abondance des denrées alimentaires que l'on peut se procurer de manière presque garantie sur les marchés citadins. Cette opposition de principe s'organise également autour de la possibilité pour les habitants des villes de s'approvisionner en viande fraîche alors que les habitants des campagnes sont limités aux viandes salées. Bientôt l'apparition de la restauration, des métiers de bouche, tous inventés dans les villes, feront perdre de la majesté aux banquets princiers, mis en œuvre par des génies autodidactes, au profit d'une cuisine élaborée par des professionnels regroupé en confréries et d'accès plus populaire. Seuls les paysans resteront un long temps encore assujettis à des contraintes fixées par les modes de culture et de stockage de denrées, produites dans le souci d'une autosuffisance alimentaire. Dans une autre mesure, les communautés religieuses, elles-aussi, resteront fidèles à des habitudes alimentaires construites sur des préceptes d'hygiène morale où le végétarisme côtoiera longtemps la sobriété.
Dernière remarque enfin avant d'entrer par le menu, c'est le bon moment pour l'écrire, dans la gastronomie médiévale. On a également tendance à opposer quantité et qualité, profusion et délicatesse, salé et sucré, acide et fade, cuit et cru, lorsque aujourd'hui on parle de cuisine. On gagnera pour s'imaginer les plats médiévaux , leurs consistances, leurs saveurs et leurs fumets à tenter d'oublier les codes alimentaires inventés aux dix-neuvième siècle et sur lesquels nous fonctionnons toujours ...
Et d'abord, comment lit-on une recette médiévale ?
Loin d'être un témoignage précis et concis d'une pratique de cuisine, un manuscrit culinaire est, tout à la fois, la compilation plus ou moins erronée de textes antérieurs, la prise en compte d'un espace vrai mais complexe - et celui où vit le maître queux d'une grande maison est essentiellement politique - ainsi que l'expression d'un désir de perfection. Reste que ces manuscrits donnent le titre que porte la recette, les produits qu'elle met en œuvre et enfin la description du résultat attendu. Les expériences comme celle de
Villerouge-Termenès (Aude) sont rares ; les historiennes comme Carole Lambert, qui a bien voulu en assurer le suivi intellectuel et pratique, sont encore l'exception. La complexité d'une démarche restituant des techniques culinaires oubliées fait que nous sommes encore dans une phase exploratoire où tous les résultats sont précieux.
Du goût pour les épices ...
Aux dépens du poivre commun qui deviendra rapidement l'épice pauvre réservée aux vilains, le goût pour les saveurs épicées substituera à cette baie séchée de nouveaux produits : le clou de girofle, le gingembre, la graine de paradis, le poivre long , la cardamome, le galanga , le macis et la noix de muscade. Ces denrées rares et précieuses provoquent des engouements soudains et des fortunes rapides. Les comptes d'approvisionnement des grandes maisons confirment ces modes passagères, tout autant dans l'espace européen que dans le temps d'un
Moyen-Âge versatile qui refera du poivre rond une épice en vogue au XV
ième siècle après l'avoir banni de ses tables. La sauce cameline , c'est à dire à la cannelle, deviendra rapidement un leitmotiv dans l'assaisonnement médiéval. D'autres épices, plus difficiles à mettre en œuvre, comme le poivre long ou le safran, sont parées de vertus médicales, car au
Moyen-Âge aussi on se soucie de diététique. Ces épices ne sont pas mises en scène pour masquer des goûts de base, pour tromper les convives sur la fraîcheur de mets douteux, comme pouvaient encore l'écrire de brillants historiens du siècle dernier. On les met en œuvre dans un esprit, certes démonstratif de la puissance économique des commanditaires, capables de les faire venir à grand prix d'Orient ou d'Afrique, mais aussi créatif. Les épices sont associées à des ressources plus habituelles, l'ail, le fenouil, le persil, la rue, les menthes ou l'échalotte et ne dissimulent pas par leur profusion explosive la médiocrité de recettes de base. En fait elles en structurent nettement les trois saveurs essentielles des plats médiévaux, même s'il n'est guère facile, en l'absence une fois encore d'annotations précises sur la sapidité des mets préparés, d'en avoir une idée nette. La cuisine, ou mieux les cuisines médiévales, jouent une gamme fondamentale de trois saveurs : la forte, épicée, la douce, sucrée et l'acide. La forte, nous venons d'en explorer les ingrédients constitutifs, les épices. La douce est obtenue par l'usage commun de différents sucres, sucres des fruits, miel ainsi que le sucre de canne sous ses formes raffinée (blanche) et brute (rousse) - c'est d'ailleurs une denrée hors de prix, presque aussi chère que les épices. L'acide enfin met en vedette le verjus, sauce " vinaigrette " à base de jus de raisin vert salé et bouilli, ou les jus d'agrumes - citrons et oranges amères. Ce sont plutôt les méditerranéens qui préfèrent la saveur sucrée. Dattes, figues, pruneaux, miel ou raisins secs ne figurent que rarement dans les recettes issues des zones géographiques hors les limites d'un grand Sud européen.
Exotismes culinaires
Ces saveurs s'accompagnent d'une originalité de provenance géographique pour certaines recettes dont les titres renvoient à des contrées parfois éloignées, comme la tourte de Hongrie. Par les relais économiques et scientifiques du monde arabe, grâce au zèle commercial qui anime les grandes cités marchandes de Bruges, Gênes, Barcelone ou Venise, ce ne sont pas seulement les denrées qui voyagent mais également les modes culinaires. Maître Chiquart dicte en français les textes de son réceptaire à la cour de Savoie toute italienne. Ce brassage continuel produit des résultats unificateurs sur les habitudes culinaires européennes. Il n'en gomme pas les spécificités mais en prépare les futures harmonies.
Une autre triade importante : celles des matières grasses
Selon qu'il faille frire ou rissoler, amollir ou assaisonner, on utilise au
Moyen-Âge les graisses animales, lard ou saindoux, le beurre ou les huiles végétales, de noix ou d'olive. Nécessité de chaque jour dans une cuisine bien faite, les matières grasses dépendent étroitement des contraintes géographiques et économiques. Pourtant l'emploi du beurre n'est pas limité aux régions de forte production bovine. Il est, semble t'il, l'apanage alimentaire d'une grande Europe du nord. Il devient en France une graisse de carême qui accompagne le poisson. Mais il continue de dessiner les frontières d'une résistance culinaire aux graisses animales : celle d'une France du Sud déjà associée à l'huile d'olive.
Soit, mais que mangeait-on ?
L'historien de la gastronomie ne peut qu'être surpris par l'abondance de l'alimentation carnée, abondance telle qu'elle en devient parfois proprement douteuse. On sait que l'alimentation de base est faite de céréales, panifiées ou cuites en bouillies et pollentas, comme les différents mils et l'avoine. On connaît également l'importance alimentaire de la production en légumes frais et légumineuses des jardins proches des habitations (je vous renvoie au numéro de Pays Cathare Magazine consacré aux jardins médiévaux). Et pourtant la lecture du Viandier de Taillevent sonne comme un inventaire de tous ce qui porte des plumes et se mange . Voyez plutôt : alouettes, cailles, oies, poulets, chapons, gélines, pigeons, poussins, pluviers, butors, cigogne, grue, cormorans, paons, canard, cygnes et hérons. Farcie sous la peau de sa propre chair, de mouton et de porc hachés, avec des œufs, du fromage et des épices, la volaille est troussée, dorée au jaune d'œuf et rôtie à la broche. Bouillie et froide, on l'accompagne d'une sauce à la sauge. On consomme beaucoup de petits oiseaux, comme le laisse supposer la grande fréquence d'une recette baptisée le " gravé de menus oiseaux ". Revenus dans du lard fondu, les petits oiseaux sont mouillés d'un bouillon de viande épaissi de pain rassis émietté, auquel on ajoute après l'avoir filtré du verjus, de la cannelle et du gingembre. Il paraît même que l'on mangeait de la chouette, des pies et des corneilles, mais le gourmand que je suis demande à voir. Enfin les paons et les cygnes sont servis revêtus aux tables nobles, sous forme d'entremets. Il s'agit de plats rares, chefs d'œuvre de gastronomie et d'art culinaire, destinés à produire un effet d'admiration, comme la recette du coq heaumé, autre fleuron des entremets médiévaux.
On mange aussi beaucoup d'espèces de poisson, et du poisson frais. C'est d'ailleurs le moyen pour les classes privilégiées d'adoucir les rigueurs des carêmes et des jeûnes. Les livres de cuisine font de plus la distinction entre les poissons d'eau douce et les poisson d'eau de mer. Les deux sortes en sont consommées autant l'une que l'autre. On considère les mammifères marins, comme la baleine franche de Méditerranée baptisée grappois ou crappois, comme des poissons que l'on mange préparés comme des venaisons, cuites en lamelles et servies avec des pois. Leurs modes de cuisson sont finement décrits. Il est par exemple conseillé de garder les têtes et les queues des poissons destinés aux courts bouillons, pour en renforcer le goût. Le Ménagier de Paris conseille de toujours cuire les poissons d'eau de mer à l'eau froide mais de commencer la cuisson des poissons d'eau douce dans l'eau frémissante.
Le gibier est également très apprécié. On chasse puis on déguste du cerf, du sanglier, du lièvre, du lapin, du chevreuil mais également de l'ours ! Le Ménagier de Paris donne une recette pour contrefaire de la viande de porc en venaison d'ours. Le lapin, appelé connin au
Moyen-Âge est très apprécié. Le boussac de connins, version médiévale d'une daube très réduite à la cuisson , est véritablement un régal.
Une cuisine multicolore. Beaucoup de titre de recettes médiévales mentionnent une couleur et rares sont les recettes qui ne donnent pas de conseils pour obtenir une couleur souhaitée. Parmi les potages on distingue les porrées vertes, blanches et noires. On conseille de juste faire blanchir le vert des feuilles de bette ou d'oseille pour leur conserver une belle couleur verte . La couleur est souvent obtenue en additionnant des épices colorées, comme le safran qui donne une belle couleur jaune, ou le bois de santal pour obtenir des variations de rose et de rouge. On peut faire plus simple avec du persil, ou des jaunes d'œuf, du pain grillé presque brûlé pour le noir et du lait d'amande pour le blanc.
Un repas se déroule toujours de la même façon parfaitement ordonnancée. Avant toutes choses, on se lave les mains avec une décoction de plantes parfumées versée par les becs ouvrés d'aquamaniles souvent somptueux, représentations d'animaux fantastiques. Les convives sont placés à table, dans le respect absolu d'une hiérarchie sociale bien comprise. Gare à qui se méprendrait et s'octroierait une place qui ne serait pas celle de sa condition ou de son rang. La table médiévale est le reflet de la société. On s'y attable pour y être vu et conforter ainsi son statut. Le plan de la table tout comme l'ordre des services dépend de cet ordre social. Tout y est étiquette, codes de savoir-vivre et démonstration de pouvoirs. Les festins se composaient de plusieurs services, construits chacun de plusieurs plats, souvent servis ensemble, en portions communes et non pas en parts individuelles. Se succèdent ensuite dans un ordre immuable les potages, les rots, les patés et les entremets suivis d'une sorte de dessert. Les festins se prolongeaient par deux autres services, les issues et les boute-hors, où l'on servait, autant pour inciter les convives à déguerpir que pour les aider à digérer, des friandises préparées pare des apothicaires et des liquoristes, les épices de chambre arrosés de vins aromatisés et sucrés comme l'hypocras.
Il faut réserver la présentation des préceptes diététiques, préceptes qui guidaient l'alimentation des riches et des puissants dans le dédale d'une alimentation magique tout autant que médicinale, à un prochain article sur la médecine médiévale. Les préceptes des maîtres latins hérités de l'Antiquité , ainsi que ceux arrivés du monde arabe qui les contredisaient ouvertement, se condenseront dans les règles opératoires de l'alchimie. On observera alors beaucoup d'interférences entre les mondes de la cuisine et de la médecine ; ces mêmes interférences qui faisaient des confiseries baptisées " épices de chambre " des produits exclusivement réalisés par des apothicaires. Dans les alambics de la même époque on y distillera et condensera les rêves de richesse absolue, de vie éternelle et de négoce des eaux de vie. L'homme médiéval instruit se devait d'équilibrer sa condition physique par des aliments adaptés à sa condition et ses occupations. Beaucoup d'ingrédients innocents sous les mains des cuisiniers pouvaient, dans celle des apothicaires, se parer de talents nouveaux. La frontière entre l'aliment qui nourrit et celui qui guérit n'est jamais parfaitement étanche. Au
Moyen-Âge également beaucoup de craintes diffuses, de rumeurs populaires et d'empirisme définissaient ce qu'il était propre et impropre de consommer, tout le long de modes fluctuantes. Combiner l'hédonisme et la prudence incitait les grands et les puissants à faire apparaître sur leurs tables des " cornes de licorne " - en fait des défenses de narval- sensées saigner pour prévenir de la présence de poison ou bien à se faire soigner avec de la poudre de pierres précieuses et d'or.
On l'a vu par ce rapide tour d'horizon, la gastronomie médiévale n'a rien à envier à ses modernes héritières. La présence d'épices ne nous étonne plus, pas plus que les combinaisons salées - sucrées ou douces - acides. Le plus exotique est sans doute pour nous l'abondance carnée et la fréquence d'animaux présentés entiers. Egalement que toutes les espèces animales ou végétales pouvaient être consommées, alors que nous limitons aujourd'hui à une gamme relativement restreinte. Réjouissons-nous, gourmands modernes, il y a encore des goûts nouveaux à explorer au pays d'autrefois.
Nicolas Gouzy / C.V.P.M.